Dans la bataille des idées

Dans notre roman national, Vercingétorix, Clovis, Jeanne d’Arc jouent incontestablement un rôle fondateur.

Montaigne, Descartes, Montesquieu, Voltaire, Rousseau … il est toujours possible de discuter de telles ou telles incarnations du génie français qui ont pu faire émerger un rayonnement incontestable au XVIIe et XVIIIe siècle.

Ce que la France a apporté au monde est connu : le message est contenu dans les Lumières et les valeurs de l’humanisme, la démocratie, le progrès social, la reconnaissance des femmes, la laïcité ou la liberté de conscience, tout cela est résumé en quelques mots : Liberté Egalité Fraternité.

Il faut aussi se rappeler que le premier rapport de force consécutif à l’émergence de ces valeurs et de ces bouleversements est d’abord défensif : c’est la patrie en danger, l’appel aux soldats de l’an II, Valmy.

Un autre moment défensif décisif se situe sans doute à Londres avec l’appel du 18 juin du Général De Gaulle.

Il s’agit alors de former les premiers germes d’une alliance avec l’Angleterre et les États-Unis contre l’ensemble des dictatures nationalistes et impérialistes qui sont en train de conquérir le monde, l’Allemagne nazie évidemment en première ligne.

Braudel dirait sans doute qu’il faut toujours remettre en perspective temporelle les événements.

De ce point de vue, depuis Eschyle la lutte entre les valeurs de progrès et l’obscurantisme tyrannique trouve ses premières illustrations dans « Les Perses » et les affrontements successifs entre l’empire perse et les hommes libres grecs, notamment d’Athènes.

Toutes proportions gardées, dans le monde ouvert et globalisé de ce début de XXIe siècle l’histoire est également en train de s’écrire et les tensions que nous ressentons en France en sont d’ailleurs significatives.

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Appel aux soldats de l’An II et aux hommes et femmes de bonne volonté, souhaitant changer le monde

 Entre confinement et déconfinement, la crise sanitaire actuelle constitue un moment stupéfiant qui nous interpelle tous. La période est évidemment propice à la réflexion. Elle nous invite surtout à nous engager pour l’avenir.

Avant même la crise du coronavirus, il semblait en effet que plus rien ne pouvait arrêter la course frénétique de l’humanité vers sa propre destruction. Déjà annoncée, la fin du monde semblait inéluctable, notamment en raison d’un réchauffement climatique qu’il semblait dorénavant vain d’espérer stopper. Des épisodes météorologiques catastrophiques laissaient entrevoir les premiers signes de l’Apocalypse et la pandémie mondiale a ainsi marqué définitivement et très concrètement le passage vers le monde d’après, vers cet « ailleurs sombre » devenu notre réalité.

Certains aujourd’hui constatent aussi l’arrêt de toute activité, la mise de notre monde en mode « pause » avec peut-être quelques aspects bénéfiques, notamment pour l’environnement. A un autre niveau, comme Edgard Morin, il est possible de se demander « si les dé-confinés reprendront le cycle chronométré, égoïste, consumériste avec, peut-être, un essor de la vie conviviale et aimante ? ». D’autres « éclaireurs » annoncent « le passage d’un ancien monde qui se meurt dans l’attente d’un nouveau monde qui se prépare à naître ».

Rien ne sera donc plus comme avant ?

Pour notre part, nous considérons qu’il est illusoire de se contenter de vœux pieux ou de penser que par enchantement, la situation du monde va s’améliorer. La main invisible ne deviendra pas soudain philosophique, et encore moins philanthropique. L’oubli risque de l’emporter rapidement et les affaires reprendront, comme après la crise économique de 2008 : « same as usual »

Les enseignements de l’épreuve doivent pourtant être tirés. Il est évidemment possible d’espérer que la période à venir marque une rupture forte avec la précédente, en permettant des évolutions plus raisonnables, plus justes, moins matérialistes et plus humaines. Mais cela ne se fera certainement pas sans des confrontations politiques pour lesquelles les forces de progrès doivent s’organiser et se mobiliser, d’où cet appel.

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La République

Pour définir ce qu'est la République[1], il faut réfléchir sur ses fondements, et noter qu'il y a eu dans l'histoire de la France une rupture, celle de 1789, qui marque l'avènement d'une autre idée de la société, l'idée républicaine, fondée sur le progrès, et dont les trois composantes essentielles sont : la pensée des Lumières ; l'humanisme ; et une organisation de la politique autour de la participation des citoyens à leur propre destinée.

L'histoire de l'idée républicaine a commencé par la Politeia[2] d'Athènes, qui instituait la participation du peuple souverain aux décisions engageant l'homme et la cité avec la création d'un espace public, l'agora[3]. Dès lors, le régime républicain se définissait comme l'organisation politique de la société en vue de l'administration de la chose publique par un gouvernement émanant de la volonté générale. Socrate a très tôt dénoncé la problématique de la tension entre les droits de l'État et les droits de l'individu, alors que finalement Platon a conçu l'État comme exerçant un totalitarisme politique. La naissance de la République à Rome, aux environs de 500 avant J.-C. se confond avec la reconnaissance de la liberté du citoyen et de ses droits personnels et politiques, par opposition au pouvoir absolu qui avait précédé. Le pouvoir fut alors délégué à des magistrats l'exerçant pour une durée limitée, le respect des lois par tous à égalité constituant le fondement de la pérennité du régime.

Communautarisme

Le mot communauté, depuis quelques années, s'est banalisé dans le sens où on parle de communautés religieuses, régionales, sexuelles, voire de motards, « en colère », en attendant celle des chasseurs. Dès ses origines latines, le mot, semble- t- il, a impliqué un lien très puissant. Le mot communauté s'applique à un groupe de personnes qui possèdent un caractère commun jugé capital par elles : religion, ethnie, origines, activités, pratiques...

Notre République se trouve confrontée à un véritable phénomène de société qu'on peut désigner par le terme de communautarisme. Il peut légitimement nous inquiéter s'il se développait.

Après un rappel des grands principes qui régissent notre République, je voudrais présenter une analyse du communautarisme dans son essence et ses pratiques, puis nous situer comme républicains par rapport à ce phénomène.

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